Au cours de la rédaction du PNA, un modèle d’habitat avait été réalisé à partir des données collectées en mer sur la période 2004-2018. Ce modèle a permis d’affiner la connaissance que l’on a de l’utilisation spatio-temporelle des zones côtières françaises par le Puffin des Baléares entre juin et octobre, et notamment des zones préférentielles de stationnement qui s’avèrent être : la côte ouest du Cotentin, la baie de Saint-Brieuc, la mer d’Iroise, le Mor Braz, la côte vendéenne/île d’Yeu et le littoral basco-landais/Gouf de Capbreton.
Prédiction de la distribution du Puffin des Baléares en France au mois de Juillet (Abondance prédite proportionnelle à l’intensité de la couleur jaune) ©OFB
Des incertitudes et lacunes de connaissances subsistent en termes d’utilisation spatio-temporelle fine des secteurs préférentiels, et en termes d’écologie alimentaire : rythme d’activité, régime alimentaire, proportion de proies naturelles/rejets de pêche, etc. C’est pourquoi un programme de suivi par bio-logging (par GPS-GSM) sera mené dans le cadre des actions de ce PNA, impliquant notamment une première phase de captures en 2022 au cours de laquelle des Puffins des Baléares seront capturés et équipés, sur le secteur du Mor Braz qui est l’un des secteurs préférentiels de stationnements de l’espèce. C’est sur ce programme que viendra s’adosser ce programme, afin de mutualiser l’échantillonnage et d’étudier l’écologie alimentaire et la contamination de cette espèce.
L’exposition de l’avifaune marine à la pollution environnementale est une problématique de conservation importante dans un contexte de modifications environnementales profondes en lien avec le changement climatique, et par effet cumulé avec d’autres pressions subies en milieu marin. Comme pour tous les prédateurs supérieurs, les oiseaux marins sont parmi les plus exposés à cette contamination environnementale du fait de leur position au sommet de la chaîne alimentaire engendrant une bioaccumulation de ces éléments dans l’organisme. Même si les polluants et contaminants ne sont pas considérés comme une cause de mortalité directe chez les oiseaux marins, ils sont à l’origine d’effets chroniques tels que des dérèglements hormonaux, immunodépresseurs ou neurotoxiques qui peuvent directement impacter leur condition et ainsi amplifier leur sensibilité aux autres facteurs de stress environnementaux.
Ainsi, un enjeu majeur est d’évaluer et de comprendre la contamination des prédateurs supérieurs aux polluants à très large échelle spatiale et les risques liés à cette contamination pour ces espèces vulnérables. Cela est d’autant plus vrai pour une espèce comme le Puffin des Baléares, en danger critique d’extinction, pour laquelle nous n’avons aucune donnée locale sur ce niveau de contamination.
Dans ce contexte et afin de compléter ce travail d’acquisition de connaissances en vue d’améliorer les mesures de conservation qui seront mises en œuvre au travers de ce PNA, le projet consistera à mettre à profit/mutualiser la capture d’oiseaux dans le cadre du suivi télémétrique pour prélever des tissus afin de réaliser :
L'importance des rejets de pêche dans l'alimentation du Puffin des Baléares reste à caractériser et à quantifier ©Adrien Lambrechts - OFB / David Lédan
Des prélèvements de sang/plumes pour analyses isotopiques et de contaminants sont effectués sur les oiseaux capturés dans les eaux territoriales françaises (dans le Mor Braz pour les campagnes 2022 et 2023, aux Glénan et en baie de Douarnenez en 2024). Les opérations de capture font intervenir une équipe internationale pluridisciplinaire et expérimentée, qui mobilise la technique éprouvée de capture au filet projeté par canons à air comprimé (« netgun ») depuis une embarcation légère. Les prélèvements de sang/plumes sont réalisés sur ces mêmes oiseaux capturés en mer pour ce suivi par biologging.
Pour les campagnes 2022 et 2023, le projet s’inscrit également dans un contexte de qualité des eaux particulièrement sensible. En effet, le Mor Braz est une baie relativement confinée, recevant des flux importants de sels nutritifs apportés par la Loire et la Vilaine en provenance de leurs bassins versants. C’est un des sites les plus sensibles de France aux effets de l'accumulation de ces nutriments et à l’eutrophisation, qui engendre régulièrement des crises hypoxiques et des blooms de phytoplanctons. Également, la présence de contaminants chimiques est avérée, notamment par des métaux lourds et le TBT via le bassin de Loire aval (bassin très industrialisé) et par des pesticides via le bassin de la Vilaine (ELV). L’étude de la contamination du puffin des Baléares lors qu’il occupe cette région permet donc également une évaluation indirecte de l’état de la contamination environnementale locale (bio-indication).
Les 2 campagnes 2022 et 2023 dans le Mor Braz ont été couronnées de succès: 30 +30 individus ont été capturés, et ont fait l'objet des prélèvements attendus (voir la rubrique "Le programme de suivi télémétrique" pour le détail des campagnes).
La campagne 2024 a également été courronnée de succès: 13 individus ont été capturés dans la baie de Douarnenez en juillet, puis 15 individus en août à l'est de Glénan. 2 individus avait préalablement été capturés près du Cap Fréhel en juillet.
Pose de GPS, prise de sang, mesures morphométriques lors de la campagne d'août 2022
Prise de sang et mesures morphométriques lors de la campagne d'août 2023 ©SKRAVIK
Télécharger ici la présentation du programme "écologie trophique & contaminant" du PNA , proposée par Gauthier Poiriez (GON) lors du séminaire international de juin 2024.
Télécharger ici la présentation complète de la manip 2022 : diaporama de présentation de la manip de capture Mor Braz 2022
Télécharger ici le rapport de stage de Master II relatif à l'analyse des résultats de la campagne 2022 (contaminants et écologie trophique)
Télécharger ici la publication dans marine Environmental Research qui s'appuie sur l'analyse des prélèvements sang & plume des Puffins des Baléares capturés en 2022: Iglesias & al, 2024 et le diaporama de présentation des résultats spécifiquement liés au Puffin des Baléares, présenté lors du séminaire international de juin 2024.
La campagne 2022 a été financée par l'Agence de l'Eau Loire-Bretagne, avec un co-financement OFB matérialisé par la mutualisation des opérations de captures d'oiseaux pour équipement GPS. Le travail est assuré par le LIENSs, laboratoire sous co-tutelle CNRS et Université de La Rochelle, avec une coordination générale assurée par l'OFB (animation du PNA).
La campagne 2023 a bénéficié d'un financement du parc éolien en mer de St-Nazaire, avec un co-financement OFB/EMYN matérialisé par la mutualisation des opérations de captures d'oiseaux pour équipement GPS. Le travail est assuré par le LIENSs, laboratoire sous co-tutelle CNRS et Université de La Rochelle, avec une coordination générale assurée par l'OFB (animation du PNA).